La vie au taux du jour
Dépêches de l'agence de presse privée Ana et le Congo (AnaCo) - Série 1
Première compil de dépêches (déchaussées, divagantes, yoyotantes) de l’agence de presse privée AnaCo : dépêches (littérature « immédiate », sketches interactifs, croquis à la carte ou dazibaos bringues-zingues-dingues, que sais-je…) dont certaines ont déjà été placardées sur internet ou spammées sur Outlook… dans lesquelles je m’autorise à exercer, en toute liberté, mon droit de citoyen de me mêler de n’importe quoi… et surtout d’ « affaires » dont on m’a bien fait comprendre que je n’y connaissais rien et qu’elles ne me concernaient pas du tout… et que j’avais plutôt intérêt à fermer ma grande gueule.
Nassogne (Badja), Matonge (Bruxelles), 2006-2007
Extraits - En vrac
Sur l'agnace AnaCo, voir aussi:
http://anaco2.blogspot.com/
et http://anaco3.over-blog.net/
Bagarres
Au marché Koweït, au croisement des avenues Sport et Kasa-Vubu, deux groupes de jeunes, l’un de Matonge et l’autre de Kasa-Vubu, regroupés en écuries (« Mondesu » pour les jeunes de Matonge et « Zoulou » pour ceux de Kasa-Vubu) se sont affrontés avec de jet de pierres et de bouteilles.
Tandis qu’à Barumbu, vers une heure du matin, une bagarre a opposé les membres du club « Bengazi » du camp Ndolo (armés de machettes, de couteaux et de tournevis) à ceux du club « Armée Rouge » du quartier Sitasi qui fêtaient bruyamment l’anniversaire d’un des leurs dans un bistrot-terrasse situé près à proximité du siège de l’autre club et qui avaient refusé de verser aux gens de Bengazi la « rançon » que ceux-ci étaient venus réclamer pour violation de territoire.
Tandis qu’à Matete, les pratiquants des arts martiaux du quartier Bantandu (un sportif du club Dragon Rouge, résidant au quartier Bantandu et se rendant à Ndjili en traversant le quartier De Bonhomme, avait été interpellé et copieusement battu par des jeunes sportifs du coin) connus sous le sobriquet d’« Onusiens » ou de « Zoulous » ont affronté ceux du quartier De Bonhomme. Toujours à Matete, d’autres bagarres ont opposé les sportifs du quartier Ngilima à ceux de Kunda et ceux de Kinsaku à ceux de Mongo
Tandis que les « Zoulous » de la commune de Makala (dont siège social est établi à l’arrêt de bus « le Destin ») ont mené une expédition punitive contre leurs homologues de la commune de Bumbu (dont l’état-major est implanté aux environs du marché « Moselu », dans le quartier Lokoro, le long de l’avenue Gambela) et que les riverains ont dû se barricader à l’intérieur de leurs parcelles et que les vendeurs du marché, pris de panique, ont dû
- Allez faire vos courses ailleurs ! Personne ne vous oblige à faire vos courses chez nous !
rapidement fermer boutique et plier bagages.
Et, pendant ce temps-là, à quoi s’occupaient donc les autres écuries, les Mbeli-Mbeli, les Indiens, les Britanniques, les Bana Romain ?
Et les Bana Bofala qui habitent les environs de la rivière Kalamu, dans la commune de Ngaba, interdisent aux jeunes de la commune voisine de traverser leur territoire, détruisent tous les passages à gué qui relient les deux communes, sauf le pont « en dur » de l’avenue Nsele qu’ils utilisent pour opérer des incursions punitives dans les quartiers Kimpwanza et Masano de la commune de Lemba.
Tandis que dans la commune de la Gombe, des jeunes gens
- Des shegués du cimetière qui n’ont peur ni des soldats ni des revenants et ne verrouillent jamais la porte de leur domicile ? Des shegués du marché central et de l’avenue Rwakadingi (faisant frontière entre la Gombe et la commune de Kinshasa) ?
ont brûlé des pneus au carrefour de la poste, sur le boulevard du 30 juin, devant le siège de l'Union européenne et au niveau du rond point Forescom. Ils entendaient
- Ou étaient payés pour ?
protester contre l'incendie qui a détruit les installations des chaînes de télévision Canal Congo Télévision (CCTV) et Canal Kin Télévision (CKTV) et de Radio liberté, médias appartenant au vice-président de la République Jean-Pierre Bemba, candidat au deuxième tour de la présidentielle.
On a toujours un ours derrière soi
On a toujours un ours (un gros ou un petit) derrière soi. Un ours (considéré comme très dangereux car se rapprochant trop des troupeaux et des fermes) qui étripe vingt moutons, décapite huit lapins, renverse cinq ruches et chevauche une ânesse (lui agrippant les cheveux et la bourrant de coups de pied). Un ours, une histoire, un nuage, une fumée, des cendres, des rancunes, des crottes, un cancer de l’hypophyse.
- Oui, mais un tout petit seulement !
- Mais c’est déjà le deuxième ! Je ne t’ai quand même pas épousée pour devenir veuf ! Je ne pourrai jamais supporter de me réveiller ou de m’endormir à côté d’un cadavre ! Ni de m’asseoir à côté d’une ombre ou de m’allonger à côté d’une place vide !
Les dieux sont-ils descendus des cieux le long du cou d’une girafe ou de la trompe d’un éléphant ou du tronc d’un cocotier ? Ont-ils tisonné et réveillé les volcans et agité les eaux du fleuve ? Ont-ils organisé, l’année dernière, une grande tombola ? Dont le gagnant devait
- C’était le gros lot !
se choper
- Ça déchire grave ! J’hallucine !
le plus beau cancer de l’année ? Et échapper ainsi à la méningite, à l’hémiplégie, au paludisme, à l’alcoolisme, à la dépression et au suicide, au diabète, aux rhumatismes, au christianisme, à Parkinson, à Althusser
- Alzheimer ! On dit que les rats, les lapins et les simbilikis qui, depuis leur adolescence, fument régulièrement du bangui, développent plus rarement (ou plus lentement) le maladie d’Alzheimer ! Tu as donc toutes tes chances ?
à la cataracte et au sida ? Et ne souffrir d’aucune intoxication (due à un excès d’hormone thyroïdienne), généralement quelconque, pour avoir absorbé des gélules « pour maigrir » préparées en pharmacie, sur prescription médicale, à base d’extraits de glande thyroïde de porc ?
Quel numéro avais-tu tiré ? Es-tu devenu pauvre du jour au lendemain. As-tu coupu les ponts avec beaucoup de gens, rompu avec ta femme et perdu la plupart de tes amis ? As-tu changé de vêtements et d’habitudes alimentaires ?
Tout le monde était atteint
Personne n’était indemne.
Le lait des nourrices, les œufs des poules, les poissons de la rivière, les champignons sanguinaires
- A la pointe de l’aube, au bord de la rivière, les champignons carnivores se jettent sur les limaces et les dévorent toute nues !
des sous-bois, les sangliers de la forêt, les lièvres du pré, les tomates du jardin, les bûches du foyer.
Tout le monde était atteint.
Le grain et le fourrage donnés aux bêtes, la fumée du feu de bois, les cendres servant à amender le jardin, le crottin des animaux utilisé comme engrais.
Le poison se trouvait partout.
Le sang de nos veines, les larmes de nos yeux, le sperme de notre bite, les pertes de notre vagin.
Tout était contaminé
Des charrettes à cheval quittaient le village, chargés de meubles (une table, deux ou trois fauteuils, un dressoir, six chaises, un grand miroir), de matelas en mousse et d’ustensiles de cuisine
Couché sur un matelas et sous une couverture
Un magnat du meuble russe (amateur de faïences, de porcelaine et d’émaux) aurait-il égorgé un ancien chauffeur de camion de cirque (amateur de fruits de mer, de filles de salle et de femmes de chambre) ?
Et l’aurait-il éviscéré par arrachement d’organes (les couilles, l’œsophage, la rate, le foie, le pancréas, le cœur, l’estomac, les poumons, les reins et les intestins) alors qu’il était toujours en vie ?
Avec un cutter.
Et aurait-il abandonné
- Complètement vidée de ses entrailles !
sa dépouille en pleine rue, devant la grille de l’entrée de service (personnel et fournisseurs) d’un abattoir, ?
Sur un matelas, pour qu’il soit confortablement installé ? Et sous une couverture, pour qu’il ne prenne pas froid ?
Les grandes découvertes
Ainsi donc
Christophe Colomb
- Fallait-il l’envoyer à la conquête de la lune et des étoiles ?
a-t-il découvert le chocolat
chez les Aztèques ?
Tout comme Léopold II a découvert le caoutchouc, le cuivre, le diamant, l’or et le copal
dans les royaumes du Kongo ?
Et G.W. Bush le pétrole
- Que la terre d’Iraq brûle les pieds des Américains jusqu’à ce qu’ils s’en aillent ! Que les mises en bière se succèdent au cimetière d’Arlington !
en Mésopotamie ?
Et s’est-il fait voter une « loi Verdeille » qui lui permet d’envoyer ses soudards envahir, avec leurs chiens et leurs fusils, sans autorisation préalable, les propriétés privées du monde entier pour y poursuivre des « gibiers » (leurs femmes et leurs petits, tous des terroristes ou de la graine de terroriste !) si les propriétaires des lieux sont de la mauvaise race ou de la sale religion et qu’ils ne disposent pas d’un bon paquet d’actions côtées à la bourse de New-York ?
